Ce qu’il y a de bien avec les comptines pour enfants, c’est qu’on peut leur faire dire ce qu’on veut. C’est d’ailleurs assez souvent très pratique quand on est parent. 🙂
« Maman, les p’tits bas taux qui vont sur l’eau ont-ils des jambes ?
Mais oui mon gros bêta, s’ils n’en avaient pas ça ne march’rait pas »
Avec de telles paroles, nous avons bien confirmation que le marché du financement de l’immobilier ressemble à une histoire à dormir debout. Debout sur ses deux jambes, mais un seul bout en ce qui concerne celui par lequel on ne sait pas où commencer. Normal, les comptines, c’est fait pour endormir.
Et debout ou couché, finalement, on s’en fiche. Comme de notre premier dinosaure.
Ah, tous ces bas taux qui quittent le port sans parvenir à destination… Mais à quoi servent-ils ? Et à qui ne servent-ils pas ?
« J’vous l’demande un peu ma brave dame : quel intérêt d’avoir des taux aussi brillants si les taux mats ne murissent pas ?
C’est la faute à la météo du financement immobilier, mon bon Monsieur, on n’fait pas toujours c’qu’on veut, mais c’qu’on peut. Et parfois on peut peu. »
Mais encore ?
Pourquoi des taux d’intérêt aussi bas ?
Les spécialistes du financement immobilier, courtiers en crédit immo en tête, nous annoncent que les taux moyens des prêts sont maintenant passés sous la barre des 3 % au mois de Mai (pour une durée de 15 ans).
Si la nouvelle est réjouissante pour ceux qui ont un projet dans les cartons, sortir le champagne (vous savez, pour baptiser les bas taux 😉 ) ne sera de mise que si on peut la rafler. En d’autres termes, les promesses rendent les fous joyeux, tout comme les comptines endorment les enfants.
Jusque là, ce n’était donc pas gagné : rendus méfiant par la conjoncture, contraints par le respect de ratios réglementaires prudentiels (dits de Bâle 3) et conscients de la fragilisation de l’emprunteur moyen, les prêteurs avaient sensiblement durci les conditions d’octroi de leurs crédits.
Et les pauvres candidats à l’achat restaient devant la vitrine avec un sentiment d’injustice pas toujours infondé…
Aujourd’hui, le contexte change un peu :
- Les banques peuvent se refinancer plus facilement à des taux d’intérêt en détente grâce à la position de la BCE (banque centrale européenne)
- Elles ont pris du retard sur la reconstitution de leurs encours de crédit immobilier et donc de leur marge brute
- Elles ont besoin de fidéliser de nouveaux clients et le crédit immobilier est traditionnellement le fer de lance des campagnes de conquête clientèle
Il y a donc sans doute un créneau de tir favorable pour les candidats au crédit immobilier, car il semble que les organismes financiers, tout en respectant une orthodoxie financière classique sur les niveaux de revenus, réintroduisent un peu de souplesse dans les analyses de dossiers en ce qui concerne le niveau de l’apport personnel par exemple.
Une embellie durable ?
Sur ce sujet, on pourra entendre tout et son contraire. Certains courtiers ont néanmoins d’ores et déjà annoncé qu’ils ne voyaient pas les taux longs remonter avant de nombreux mois.
J’ai tendance à partager ce point de vue.
D’une part, le niveau d’activité est actuellement très bas et la nécessité de prêter est importante. Je parle là de la nécessité commerciale et financière pour les banques.
D’autre part, le nerf de la guerre, l’argent, est disponible à un coût très faible du fait de la politique de la BCE.
Les moyens et l’envie étant là, il n’y a pas de raison que le comportement des acteurs change à brève échéance.
En résumé, en matière de crédit immobilier, à bas l’étau, vivent les taux !
Et quelle importance, finalement ?
Les questions d’argent sont souvent très terre à terre, à juste titre d’ailleurs, car un sou marin ça ne tient pas la route 😉 …
D’où la question qui tue : faut-il se laisser mener en bas taux ?
Ah… Comme l’aurait dit Archimède, « Donnez moi un point d’appui (et un levier) et je soulèverai le monde ».
Si on part du principe que le prêt et ses conditions de taux favorables sont le levier et son point d’appui, peut on remplacer comme CRO un dinosaure par un logement neuf ? (en changeant de contexte chronologique, hein ?)
Soyons pragmatiques : pour un emprunt de 200 000 €, entre un taux à 4 % ou un taux à 3 % contracté sur 20 ans, l’écart de mensualité (hors assurance) est de 102.76 € (1 109.20 à 3 % et 1 211.96 à 4 %). Ce n’est apparemment pas énorme.
Mais si on considère que le taux passe de 3 à 4, la remontée de la mensualité est de 9.26 % et il va falloir gagner en revenu net non pas 102.76 mais 3 fois 102.76 (soit 308.28 €) de plus pour que le banquier vous donne son feu vert.
Donc, ça n’a pas l’air énorme, mais pour tous les ménages qui sont un peu juste du point de vue du ratio mensualité / revenus nets (qui doit être inférieur à 0.33 dans la plupart des banques), la marche peut devenir insurmontable.
Bref, si vous êtes très riches ou très pauvres, l’affaire est entendue, avec une logique binaire oui / non suivant votre situation personnelle. Mais si vous luttez pour faire entrer dans le moule votre projet immobilier et caler votre plan de financement, perdre près de 10 points de potentiel d’investissement ce n’est pas rien. Alors, autant profiter de l’embellie ?
De toute façon, moi, quand il fait beau, je sors, et si le paysage est sympa j’en profite. (pas les escargots, mais eux ils ont déjà leur maison sur le dos 🙂 )
Et vous, le paysage immobilier, il vous donne envie de raconter des histoires de taux taux ?
Eh bien, c’est un article qui ne compte pas les jeux de mots. Mais il est intéressant sur le fond. Il est juste que les taux bas peuvent influer sur le montant du prêt que l’on se voit accordé. Et, psychologiquement, regarder le coût du prêt peu s’avérer aussi bénéfique. Espérons que le coût bas s’écrive ainsi, et pas avec un « p »… Plus généralement, il est sûr que le financement par prêt à bas taux peut être intéressant pour les banques, car certains emprunteurs pourraient se débrouiller avec leurs connaissances. Mais les taux étant bas, le gain est minimum… et donc la manoeuvre n’a que peu d’intérêt (c’est le cas de le dire !).
Mais c’est que c’est contagieux…. l’envie de faire des jeux de mots ! 🙂