Just in time !
Les pouvoirs publics donnent parfois l’impression de s’intéresser à certains « détails » de la vie réelle.
Comme aux délais d’obtention des permis de construire.
Ah… ça fait chaud au coeur de savoir que l’on pense à nous !
Imaginer que l’on va enfin s’intéresser à l’identification des causes de ce mal endémique.
Et, surtout, y remédier ! Améliorer…
Enfin, ça, on va commencer par l’espérer, avant d’y croire… 🙂
On n’est pas CRO naïf par ici, malgré les apparences !!!
Le débit du lait, le débit de l’eau …
On croirait entendre Charles Trénet à sa grande époque.
« Oh qu’il est laid ce vilain délai, oh qu’il est beau ce débit de délai….. ».
Mais si paroles et musique font bien une chanson, il n’y a souvent que l’air qui reste.
Autrement dit, du vent ? 😉
Une mission spéciale pour réduire les délais
A en croire le titre : « Jean-Michel Baylet et Emmanuelle Cosse co-signent début Juin une lettre de mission pour accélérer la délivrance des autorisations de construire », on se rend compte que le sujet est capital…
Deux ministres pour une seule lettre de mission !
Et un préfet (le Préfet Duport) qui travaille sur le sujet, pour identifier les pratiques (sous-entendu les pratiques illicites aussi) qui allongent les délais.
Ce qui est amusant c’est qu’on ne parle absolument jamais des délais qui s’allongent parfois tellement que les permis ne sont jamais délivrés.
Une étourderie sans doute ? 😉
Mais ne soyons pas trop exigeants avant l’heure.
Bref, les résultats de la mission devraient être connus avant la fin de l’année car le délai alloué est de 6 mois pour la rédaction de ses conclusions.
On verra alors si les causes évoquées sont exhaustives et si les remèdes proposés sont pertinents.
Quelles sont les causes envisagées ?
Grosso modo, les principales causes évoquées sont techniques et politiques (au niveau local).
En filigrane, ceci veut dire que le corpus réglementaire / législatif mis en place est jugé cohérent et efficace mais que c’est localement que les choses se compliquent (je vous le simplifie, mais ce ne sera jamais dit comme ça, aussi ouvertement, CRO dangereux (!) car décentralisation et susceptibilités politiques locales obligent… 🙂 ).
Donc, ressortent des thèmes comme les insuffisances de l’administration, volontaires ou pas, depuis l’incompétence jusqu’à l’insuffisance d’effectifs en passant par une mentalité de flicage plus que de conseil (conduisant à planter plutôt qu’à faire aboutir les projets) ou les stratégies dilatoires visant à gagner du temps et demander des pièces non exigibles (du point de vue légal et officiel) pour retarder artificiellement le point de départ « officiel » du délai d’instruction.
Côté influence des décideurs politiques, on évoque prudemment les pré instructions officieuses de permis qui rajoutent des délais réels aux délais officiels et les projets immobiliers remis en cause à l’occasion de changements de majorités politiques locales.
On oublie sans doute, et de manière tellement chaste qu’elle pourrait en être volontaire (ah bon, vous croyez ? 😉 ), l’essentiel :
1- Au-delà des délais rajoutés par ces pré instructions contraires à la loi et à la légitimité douteuse, le problème essentiel qu’elles génèrent est bien la mise à mal et / ou l’abandon de dossiers de construction dans leur intégralité.
Car quand on veut faire plaisir aux riverains et qu’on vous tord le bras (amicalement bien sûr…) pour enlever 1 ou 2 niveaux, que devient l’équilibre financier et donc la viabilité du programme ?
Et quand on vous fait comprendre que vous allez aboutir à un refus de permis de construire si vous le déposez (alors que le projet est conforme aux documents d’urbanisme), vous faites quoi ?
L’homme sandwich ? 🙁
Notons au passage qu’un permis non déposé ne génère aucune statistique de délai, vu qu’il n’existe pas (pareil pour les délais masqués des commissions de pré instruction, sans existence légale, d’ailleurs).
Tiens, mais c’est pratique pour améliorer les chiffres, ça ! 😉
2- les remises en cause de projets pour convenances politiques locales ne sont pas ponctuelles mais permanentes.
Bien sûr, le problème est plus aigu en cas de changement de majorité car l’opérateur (promoteur, organisme de logement social…) croit que l’affaire est dans la poche et patatras, il est pris à contre-pied.
Mais le mal profond est la remise en cause de tous les jours. Ordinaire et têtue.
Par exemple, les refus ou les limitations – légères ou sévères – de constructibilité déjà évoquées.
Mais aussi, quand l’outrecuidant professionnel a déposé sa demande de permis sans passer devant la commission fantôme de pré instruction : on vous conseille fréquemment de le retirer avant un refus, ou on vous oppose (le plus souvent de manière abusive) la perspective d’un sursis à statuer de plusieurs années…
On est donc bien loin de parler de simples délais.
Il est plutôt question de l’usage de la démocratie et du respect de règles établies, par opposition au fait du prince (en gros, le non respect de règles connues, édictées et validées officiellement sous couvert de légitimité électorale).
Et les remèdes, docteur ?
Logiquement, si l’objectif réel et quasi unique était vraiment l’efficacité, il faudrait au moins :
- durcir les contrôles internes et le niveau d’exigence de l’administration (dont réformer la pratique du contrôle de légalité, souvent à côté des enjeux réels aujourd’hui)
- et interdire toute forme de pré instruction de permis
- tout en ouvrant aux pétitionnaires un accès large et immédiat à l’arbitrage de l’administration d’état en cas de conflit sur l’interprétation des règles du PLU et sur l’obtention ou le refus consécutifs du permis de construire.
- avec décision préfectorale à la clé, rapide et s’imposant au décisionnaire de premier rang qui ne voudrait pas se rendre à l’évidence de l’abus de pouvoir qu’il commet
Mais là, je suis en plein fantasme…
Bien loin du débit de lait ou d’eau…
Pourtant quand on a de la bouteille, on ne devrait pas rêver autant ! 🙂

Je crains fort qu’à la sortie, on ne veuille encore réinventer l’eau tiède.
(C’est laid. Mais c’est notre lot. Tiède bien sûr ! 🙂 )
Ne stigmatiser aucun responsable réel (« ouh, c’est pas bien mon petit, tu ne le feras plus, promis ? » ), donner dans la demi-mesure de façade facile à contourner, faire semblant de résoudre quelques apparences ou enfoncer les portes ouvertes.
Apprivoiser l’écume, alors que ce qui nous doit nous intéresser, c’est la mer.
Ah qu’il est beau, le débit de l’eau….
Mais faire mousser, c’est tellement plus facile que de travailler en profondeur ! 😉
Allez, on en reparle dans 5 mois maintenant.
Et bonne semaine ! 🙂