L’investissement locatif depuis 1984 : rétrospective

Investissement locatif 7 commentaires

arme anti impôtC’est marrant comme on peut se focaliser sur le court terme. Dernièrement, quelqu’un m’a posé une question du style « Le Duflot est-il mieux que le Scellier ? ».
Sur le coup, j’ai tenté une comparaison objective. Mais après coup, je me suis dit que l’intérêt de chacun des textes en faveur de l’investissement locatif ne peut se comprendre et se juger que par rapport au contexte de l’époque dans lequel il s’inscrit.

Et vu qu’ici on remonte jusqu’au temps des cavernes, grâce à nos petits orteils musclés, on n’allait pas se dégonfler devant la « rétroperspective » d’un rappel des dispositifs phare des 3 dernières décennies !
On est pour la masse, comme notre ancêtre, mais pas à la masse… Non mais !

Je sais bien qu’au début de notre saga certains n’étaient pas encore nés ou n’existaient même pas en tant que lueur de désir dans les yeux de leurs parents. C’est vrai qu’on part de loin vu comme ça. CRO loin ? Mais non ! Enfin, peut-être…

La préhistoire de l’investissement locatif

D’accord, disons que ce serait plutôt l’Antiquité qu’il faudrait évoquer, puisqu’à l’époque (1984) la première trilogie de Star Wars était quand même déjà sortie ! Ce n’est pas si lointain finalement ! Si ? (on se rassure comme on peut)

A noter que, comme dans tous les bons manuels d’histoire, chacun de ces dispositifs porte le nom de l’homme (ou de la femme, récemment) politique qui l’a porté sur les fonts baptismaux.
Etonnant, non ? Pourtant on aurait pu imaginer d’autres logiques.

Des noms de fleurs : muguet, lilas, rose, pétunia…

Ou quelque chose de plus circonstancié comme des noms de céréales ou autres végétaux : blé, oseille, radis, trèfle, fraîche… ce qui aurait été plus rafraîchissant.

Mais non, au rayon des vieilleries des dispositifs fiscaux, on est obligé de se taper des noms propres, car c’est mieux pour les manuels d’histoire.

Exemple : 1515 c’est Marignan ; Ravaillac c’est Henri IV ; l’amortissement de 1996 en faveur de l’immobilier locatif, c’est ???? C’est ??? ….

Pfff, j’hallucine, vous n’êtes pas encore mûrs pour les « Questions pour un champion » de l’investissement locatif sous tous les angles, continuez la lecture, ne passez pas par la case départ et ne touchez plus rien du tout, la situation est critique.

La galerie des portraits

1984 : à tout saigneur tout donneur, j’ai nommé Pierre Méhaignerie. Le premier généreux donateur en faveur de l’immobilier locatif neuf à usage d’habitation a imaginé un système de réduction d’impôt sur une base de 5 % du montant de l’investissement, à répartir sur 2 ans avec plafond d’investissement de 200 000 Francs pour un célibataire ou 300 000 pour un couple. A partir de 1986, un toilettage a porté la réduction à 10 % et les plafonds à 300 000 et 600 000 Francs respectivement. Un grand moment d’émotion libérale…

1993 : voici que déboule Paul Quilès. Pour les malentendants, sourds à l’appel de l’investissement façon Méhaignerie. Certains mauvais esprits avaient surnommé cette amélioration « Aboule Quilès » de par la générosité d’un mécanisme apte à faire enfin entendre (après avoir enlevé les boules Quilès ?) raison aux plus réfractaires. Porté par une majorité socialiste, ce plug-in (appelé Quilès-Méhaignerie) introduit à ce moment là pour la première fois des logiques de plafonds de ressources et de loyers, mais avec l’élégance d’une augmentation de la réduction à 15 % (sur 4 ans) et des plafonds d’investissement portés à 400 000 et 800 000 Francs.

1996 : changement de cap avec Périssol. Exit la réduction d’impôt et bonjour l’amortissement. Un amortissement pour une relance, car en 1996 le secteur du BTP est exsangue et il faut frapper fort. Le résultat : aucune contrainte sociale et la possibilité d’amortir 80 % du prix de vente sur 24 ans (10 % sur chacune des 4 premières années, puis 2 % par an sur 20 ans). Un monument d’efficacité économique en matière de relance, mais un profil politiquement trop libéral qui ne résiste pas à la dissolution de l’Assemblée Nationale par Jacques Chirac…

1999 : inflexion de cap radicale avec l’amortissement Besson. Pour rester fidèle à l’amortissement, le nouveau système apporte néanmoins de sévères changements en réintroduisant des plafonds de loyers et de ressources surtout, un peu dans la philosophie de son devancier Quilès. Une constante dans l’aide fiscale apportée par les gouvernements de gauche : des contreparties sociales. Sur le plan financier, l’amortissement était de 8 % par an pendant 5 ans puis de 2.5 % pendant 4 ans (soit 50 % d’amortissement sur 9 ans) avec possibilité de rempiler pour 1 ou 2 périodes de 3 ans à 2.5 % (soit un maximum de 65 % d’amortissement sur 15 ans).

2003 : décidément l’alternance politique joue à plein. Le nouveau sauveur s’appelle Gilles de Robien des Bois, pardon, la loi Robien. Rebelote, retour du balancier : suppression des contraintes sociales du Besson (disparition des plafonds de ressources et augmentation des plafonds de loyers). En revanche l’architecture et les montants de réduction d’impôt sont inchangés. Et l’apparition de nos chères zones A, B et C date de cette époque !

2006 : après le Robien, place au Robien recentré et au Borloo. Qui peut croire qu’il y avait du boulot pour deux ? Peu importe, nous avons eu droit à deux dispositifs pour le prix d’un seul, avec un Robien recentré qui est resté le Robien mais avec des plafonds de loyers revus à la baisse en zones B2 et C (pour éviter les excès) et un amortissement maxi de 50 % sur 9 ans. Le Borloo permet de défiscaliser sur une durée plus longue de 12 ou 15 ans jusqu’à 65 % avec des loyers réglementaires plus faibles et le respect de plafonds de ressources.

2009 : quel pied de nez ce Scellier : une si petite pièce, oui, mais une pièce de service qui a rendu un fier service. Alors que les subprimes font des dégâts depuis plus de 6 mois et que les promoteurs connaissent les délices de chiffres d’affaires trimestriels parfois négatifs, le sénateur Scellier reprend les habits de Zorro avec un dispositif dimensionné pour le très gros temps (de crise) : une réduction d’impôt directe, lisible, simple et généreuse pour être sûr d’emporter le morceau. Plafond d’investissement de 300 000 Euros, taux de 25 % sur 9 ans pour l’année 2009, et une version Scellier social qui permet de rajouter jusqu’à 6 ans et 12 % de réduction d’impôt avec des contraintes sociales supérieures (loyers plus faibles, plafonds de ressources…). Pari gagné, mais le rabot fiscal fait ensuite son oeuvre pour diminuer le coût du dispositif sur les années 2011 et 2012.

2013 : enfin une femme ! La loi Duflot arrive en surf sur la vague rose pour revisiter l’investissement locatif de la cave au Scellier. Tout en maintenant le principe d’une réduction d’impôt mais assortie de contraintes sociales supérieures à celles du Scellier social (loyers, plafonds de ressources). N’en disons pas plus pour l’instant, l’avenir racontera la suite de l’histoire !

Convenons tout de même que pratiquement 30 ans de soutien financier ininterrompu a une signification.

Certains y voient l’incapacité d’un pan de notre économie à voler de ses propres ailes.

D’autres constatent simplement que l’immobilier neuf est devenu trop cher pour offrir spontanément une rentabilité attractive. Et que l’utilisation du levier fiscal n’est finalement qu’une mesure de compensation, en réponse aux surcoûts inlassablement générés par l’empilement des normes et par l’exposition généreuse du secteur aux impôts. Sans oublier sa contribution sur le front de l’emploi.

Les deux visions sont exactes, et il existe à l’évidence une relation de cause à effet.

Le réflexe de Pavlov de l’investisseur immobilier

l'opportunité d'une réduction d'impot
De tous temps les opportunités rendent joyeux !

Certains esprits mesquins prétendent que les investisseurs ne sont sensibles qu’à l’aspect fiscal de leur  investissement immobilier.

Mais n’importe quoi…

Nous leur avons souvent conseillé de s’intéresser d’abord aux qualités intrinsèques (1) de leur investissement.

L’emplacement, l’environnement, les services, les prestations, le prix, le marché locatif etc… ce qui n’empêche pas un mouvement de joie spontanée quand passe une réduction à portée de main… Un élan primitif en quelque sorte !

(1) (c’est un peu hors sujet, mais ceci me rappelle une pseudo anecdote au sujet d’un joueur de rugby sudiste célèbre qui rrroulait beaucoup les rrrr et à qui un journaliste demandait quelle était la valeur intrinsèque de son équipe. Sa réponse ? « Intrrrrinsèque.. intrrrrinsèque ? En terrrrain sec on devrrrrait gagner ! »)

Bonne méditation positive et à la semaine prochaine !

 

Un oubli dans la galerie ? Un commentaire ? Une question ? C’est à vous !

Je m'abonne aux articles
(je recevrai un mail quand un article est publié (pas de spam)

7 réflexions au sujet de « L’investissement locatif depuis 1984 : rétrospective »

  1. Les investisseurs ne sont pas sensibles uniquement à l’aspect fiscal de leur investissement… mais c’est un élément non négligeable de la rentabilité.

    Les investisseurs institutionnels se sont quasiment tous désengagés de l’immobilier faute de carotte fiscale, les particuliers aisés ont, pour partie, pris leur place.

    Les rentabilités, du fait des prix élevés, sont tellement faibles pour ces derniers que seule une réduction d’impôt pouvait encore rendre leurs investissements favorables.

    Ils sont nombreux ceux qui n’ont regardé qu’une rentabilité sur papier glacé et une perspective de diminution d’impôt. Les perdants de Bergerac (pour ne citer qu’eux) savent très exactement pourquoi ils se sont fait avoir.

  2. C’est bien ça ; la rentabilité est un mal nécessaire pour un investisseur. Et la carotte fiscale est le moyen de l’amener à un niveau acceptable. Mais en tant que facteurs de déclenchement, il y a d’autres paramètres à prendre en compte également. Sinon, on risque la sortie de route.

  3. Après avoir lu votre article, il complète à merveille les informations que j’ai pu récolter sur le site du gouvernement http://gouv.tv/24 concernant l’immobilier locatif. Je me renseignes car j’aimerais beaucoup faire un investissement dans la pierre de façon à acheter un appartement pour le mettre en location de tel sorte que le loyer soit supérieur aux divers frais que j’aurais (crédit, assurance du crédit ….) . Il est clair que ces biens ne courent pas les rues aujourd’hui étant donné que le marché de l’immobilier est pour moi surévalué. Mais on doit pouvoir trouver des opportunités. Auriez-vous des conseils à me donner?
    Cordialement

  4. Excellent article.
    Il est clair que l’investissement immobilier ne date pas d’hier. Quant aux investisseurs, on peut dire que leur profil n’a pas trop changé. Mais, contrairement à ce que bon nombre de gens pensent, ils ne recherchent pas seulement la rentabilité.

  5. @lola89 Je n’oserais pas dire « cela n’existe pas », tellement j’aurais peur d’être démenti, mais si la recette était connue tout le monde le ferait et nous serions tous rentiers… En fait, il y a toujours un écart à combler pour équilibrer.
    Je ne dis pas que, ponctuellement, il soit impossible au bout d’une recherche acharnée de trouver un appartement ou une maison dans un secteur avec prix de vente modérés et loyers assez forts, mais cela relève de l’exception. Attention aux vendeurs de mirages ! (en France, il n’y a que Dassault ! 😉

  6. Finalement depuis presque 30 ans, la logique est presque la meme.

    Assez d’accord avec Marc, l’investissement locatif reste un investissement avant tout la prudence est de mise.

  7. Bravo pour cet article !
    Aux dernières nouvelles, les investisseurs boudent sérieusement l’investissement locatif, j’ai lu un article qui précise qu’il recule nettement en Juin, et surtout grosse chute par rapport au dispositif Scellier.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *