Promoteurs : Carbone easy ou carbonisés ?

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La vie de promoteur ne se simplifie pas vraiment.

Au-delà de la conjoncture, la somme des règles et contraintes à prendre en compte suit une courbe ascendante inversement proportionnelle au chiffre d’affaires et à la marge. Drôle de bilan.

Le foncier, bien sûr.

Les relations avec les mairies ? Avec le sourire.

Le permis de construire et les recours de tiers ? On n’y échappe pas.

La vente à perte aux organismes sociaux ? Un plaisir toujours renouvelé.

L’incertitude du prix de revient des travaux et la difficulté à fixer des prix de vente cohérents ? Une rigolade au quotidien.

Et tout ça pour la bonne cause. Easy.

Mais zut alors, si c’est pour finir carbonisés…. 😉

 

L’évolution réglementaire est impitoyable.

Et pas toujours intelligente, ce qui aggrave son cas. 🙂

Parmi les curseurs à prendre en compte dans la mise au point d’un programme immobilier, un petit (relativement) nouveau fait son apparition dans la mouvance de la RE2020.

Le bilan carbone

Air euh vain vin ?

C’est ça, phonétiquement, vous avez tout bon !

La RE2020, alias Réglementation Environnementale 2020, impose de plus en plus sévèrement son diktat.

Le seuil de base de la réglementation n’était jusque là pas dramatiquement contraignant. Mais les seuils suivants vont devenir nettement plus coton à apprivoiser !

Le jalon 2025 de la réglementation s’impose ainsi à tous les permis de construire déposés après le 1er janvier 2025.

Ou, pour les masochistes (hum… parfois fortement incités par certaines collectivités ou cahier des charges de vente en bloc par exemple), dans le cadre d’une application volontaire et anticipée génératrice de davantage de complexité et surcoûts.

Et tout ça au moment, bien sûr, où la remontée des taux d’intérêt militerait pour une modération de l’évolution des coûts et des prix, pour ne pas pénaliser les accédants à la propriété, d’autant que les investisseurs ont parallèlement déserté le marché (provisoirement au moins).

Bref, les, les quoi, l’équation n’est pas propice à l’adéquation !

CQFD, bien évidemment… 🙂

Des seuils sans paillasson ?

Dans la RE2020, pas question de s’essuyer les pieds sur les seuils.

Il faut être clean. Pas de paillasson, les mauvaises habitudes restent à l’extérieur. 🙂

Pour respecter la RE2020 seuil 2025, il faut donc valider un ensemble de paramètres en atteignant des performances meilleures que les seuils maximaux définis par la réglementation (seuils différents suivant les régions, les conditions climatiques, l’altitude etc).

Ces seuils concernent notamment (mais pas que) la qualité de l’enveloppe de l’immeuble (le Bbio), la performance énergétique vue sous l’angle de la consommation (le Cep), le confort d’été mais aussi l’impact sur le climat du projet immobilier.

Et c’est là qu’on prend un coup de chaud !

En prenant conscience que le carbone ne nous a pas à la bonne… Voire même pire ? 🙂

Vu que le bilan carbone n’est pas franchement copain avec le bilan financier du programme immobilier.

Cette histoire de carbone à ras, c’est meilleur quand c’est des pâtes ! 😉

Et c’était mieux avant ?

Mieux… disons que c’était différent, et bien plus simple !

Avant, un CCTP (le descriptif technique, ze fabulous Cahier des Clauses Techniques Particulières) parlait de matériaux ou solutions équivalents, sous l’angle de la technique, ou de l’esthétique. Il suffisait donc de regarder la performance et de vérifier à côté s’il y avait un écart de prix.

Maintenant, il faut aussi contrôler l’impact carbone, non seulement de la solution initiale définie, mais également de tout changement de prestation, variante ou autres travaux supplémentaires en cours de chantier.

Car en cas de dépassement du seuil carbone maximal, on ne sera plus conforme à la réglementation environnementale, ce qui n’est tout simplement pas envisageable pour le porteur de projet, qui doit une parfaite conformité de l’ouvrage à ses acquéreurs (et à l’autorité).Il faut donc serrer les fesses, ce qui rime avec l’épée de Damoclès ? 😉

Un exemple vaut mieux que 1000 maux ?

Allez, pour la bonne bouche, un exemple tout bête.

Un programme immobilier d’une quarantaine de logements + 300 m² de commerces en pied d’immeuble.
Réparti en 2 bâtiments A (une quinzaine de logements + les commerces) et B.

La pré étude thermique montre que les volets Bbio et Cep passent bien, même avec le seuil 2025 (respectivement 10 % de moins et 30 %, cool).
Mais le carbone… qui n’est même pas à ras vu qu’on explose le seuil sur le bâtiment A.

Ah ? A ? Ah bon ? On ne juge pas le programme dans sa globalité, A + B ?

Ben non, ce serait trop simple pour notre administration. Un programme globalement vertueux ça n’intéresse pas les foules qui nous régissent.

Il faut respecter le carbone bâtiment par bâtiment.

Vous me direz, « ben quoi, soyez pas couillon M. CRO, faut juste rassembler les deux bâtiments !!! Enfantin !!! » .

C’est sûr, mais quand la qualité esthétique du programme demande de scinder le linéaire sur rue, et que ce jugement est partagé par tous, y compris l’Architecte des Bâtiments de France qui donne son avis, on a forcément 2 entités. Distinctes et séparées.

Et comme le vilain petit canard de A est le plus petit des bâtiments (avec le moins de surface habitable), le plus riche en façade (terre cuite, qui consomme plus de carbone) et qu’il a le désavantage complémentaire d’avoir une partie de son toit en toiture terrasse (plus pénalisante), on en conclut que A tout seul ne passe pas.

Alors que B se promène. 🙂

Cas typique où le programme immobilier pris dans sa globalité serait conforme, mais ne l’est officiellement pas car le bâtiment A consomme trop de carbone.

Pffff, mais on s’en fout, non, vu que globalement on est bons sur tous les paramètres ?

Non ? Alors ça veut dire qu’un bâtiment « moins rentable » à cause de sa position géographique (une sorte de rotule urbaine avec façade riche) est pénalisé et par ricochet rend l’ensemble du projet non conforme ?

Ben oui, vous avez bien compris. La réglementation, c’est magnifique. 🙁

A force de réfléchir aux solutions alternatives, le thermicien va finir carbonisé.
(note du CRO : mais il a fini par trouver, au bord de l’épuisement, en jonglant avec toutes les optimisations de fiches FDES et profils PEP de la base INIES)

(note du CRO sur la note du CRO 🙂 : les produits et matériaux sont retenus pour des valeurs par défaut pénalisantes, sauf si le fabricant a émis une fiche spécifique plus favorable pour son produit, éditée sur la base de données de référence)

Ce qu’il faut retenir ? C’est que derrière les bonnes intentions, il y a parfois une sacrée dose de crétinisme réglementaire, et des coups de pieds au Q.I. qui se perdent !

Déjà que tous les fabricants n’ont pas encore édité de fiche ou de profil pour tous les produits et que cela réduit donc le choix de prescription et fait grimper le prix de revient de la construction… Merci pour la contribution à la maîtrise des prix de vente par contagion !

D’où la question du jour : et si on suggérait aux rédacteurs de pareilles normes de se décontracter les neurones et de s’envoyer en l’air sans restriction ?

Comme dans le bon vieux temps préhistorique ? 🙂

Ce serait CRO mignon, foi de CRO magnon !

CRO en dirigeable préhisto
C’est trop bien de prendre de la hauteur pour changer d’air…

Bah, de toute façon, on est bien obligés de faire avec.

Même les jours sans ?

Oui, oui, tout le temps, sans exception, sauf celle qui confirme la règle… à calcul ???

Pouf, il va nous falloir au minimum une semaine pour nous remettre.

 

Ca tombe bien, elle est devant nous.
Ne vous retournez pas, et voyez plus loin ! 🙂

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