PIL. C’est le petit nom du Plan d’Investissement pour le Logement présenté à la presse le 21 Mars par le gouvernement. A point nommé ?
Dans la foulée du Printemps, sentir la sève remonter et ce frémissement vital des intentions ; ça vous ferait bourgeonner un centenaire !
Bon, sans aller jusque là, ranimer la flamme vacillante du logement, pour en faire le flambeau d’une certaine reconquête ne serait déjà pas si mal.
Tout dépend cependant de la puissance du jus des mesures prévues.
Alors, ce nouveau courant : PIL ou secteur ?
Avant de porter un jugement sur un texte, le mieux c’est d’en prendre connaissance. Le dossier de presse du PIL du 21 Mars donne le détail des intentions gouvernementales : 20 mesures regroupées en 3 chapitres.
Mesures ou mesurettes ? Mémento pratique de la relance ou chapitre des bonnes intentions ?
Le contexte du PIL
C’est simple, on serait assez dans le genre PIL ou Face. Comme un joueur qui tenterait un pari osé pour en faire un coup gagnant.
L’intérêt du PIL, c’est qu’il acte que le désintérêt pour le thème du logement, depuis la campagne électorale de 2012, n’est plus de mise. Mais avant de la rafler, il faudra être capable de prouver l’efficacité et la cohérence d’une liste apparemment à la Prévert (mais sans raton laveur cependant).
Tout ça, donc, car le logement retentit à nouveau comme un sujet d’importance : pour l’emploi (ne nous y trompons pas, c’est ce volet qui intéresse les gouvernants), pour la concrétisation du droit au logement, et pour la modération des prix et des loyers à travers une offre sinon abondante, du moins consistante.
Il faut dire que le nombre de logements neufs commencés vient de passer pour la première fois depuis très longtemps sous la barre des 300 000 (295 345 de Mars 2012 à Février 2013, en baisse de 19.6 % sur la même période de 12 mois glissants), signal d’alarme évident car révélateur du grand écart avec les ambitions initiales de 500 000 logements par an. 🙁
La question de la tendance est bien sûr celle qui intéresse les décideurs. Va-t-elle se prolonger et se rapprocher d’un autre seuil psychologique (celui des 250 000) ou bien l’effet du PIL (et des mesures précédentes comme la mise en place de l’investissement loi Duflot) va-t-il suffire pour enrayer ou infléchir la courbe ?
En clair, jouer à (lancer le) PIL ou (perdre la) face ?
Le contenu des 20 mesures du PIL
Le gouvernement indique lui même qu’il y a 5 mesures principales qui concernent les délais de procédure des projets de construction et la lutte contre les recours malveillants, la répartition pertinente de l’offre immobilière, le pacte avec les HLM, la simplification des normes de construction et la rénovation énergétique des logements.
On se contentera de jauger ces 5 mesures, car les autres ne feront pas se lever les foules, même avec une poussée de sève printanière 🙂 :
- le thème des délais et des recours va évidemment dans le bon sens, mais il n’aura d’effet qu’à moyen terme. Rien à en attendre à court terme, d’autant que le souci principal est aujourd’hui moins de produire que de trouver des débouchés avec des acquéreurs motivés et solvables
- répartition pertinente de l’offre : une porte ouverte enfoncée à nouveau. Heureusement qu’on ne l’avait pas remplacée…
- le pacte avec les HLM : la TVA à 5 % est une bonne nouvelle qui sera opérationnelle et efficace. Mais sans doute pas au point d’atteindre les 150 000 logements neufs, au moins pour deux raisons : la volonté de certains organismes d’améliorer leurs équilibres de gestion au lieu de réinvestir la totalité de l’économie dans la maximalisation de leur production, et leur incapacité à faire face concrètement à l’accélération demandée car les projets des promoteurs immobiliers retardés comportent une part significative (de 20 à 30 % en général) de logements sociaux qui resteront donc dans les cartons
- la simplification des normes de construction : oui au principe, on verra le détail des mesures, mais aucun effet à espérer à court terme
- la rénovation énergétique des logements : le thème est évident, mais avec quels moyens pour le parc existant ? Il est question d’une prime de 1 350 € pour les ménages gagnant moins de 35 000 € (disponible pendant 2 ans). Là, je suis perplexe : la somme me paraît trop ou trop peu. Trop si ceux qui vont la toucher auraient quand même fait leur projet de remise à niveau énergétique (il auront peut-être accéléré leur action, et cela satisfera l’état ?). Ou trop peu pour déclencher la décision de ceux qui n’ont objectivement pas le budget pour un tel investissement (rénovation entre 20 000 et 30 000 € par exemple). Il faudra bien regarder le contenu de la mesure une fois finalisée.
Une impression d’ensemble ? Mmmmmouais…. Tout dépend ce que l’on attend du PIL, pas assez glamour à mon goût.
D’ailleurs, comme aurait dit ma grand-mère, « sur le mouillé ça glisse mais sur le sec ça PIL » (à répéter plusieurs fois à voix haute pour être sûr d’avoir compris ? ;-))
On doit sans doute être sur sol mouillé…
Donc, quelque chose à gratter ?
Jouons donc le rôle de poil à gratter.
Le poil à gratter, comme chacun sait (?), vient du fruit de l’églantier, le cynorhodon, familièrement appelé « gratte-cul ».
Ca tombe bien, ça nous démange.
Pour les hellénistes distingués, précisons que cynorhodon signifie « rose de chien » dans la langue des anciens.
Ce qui nous fait une belle jambe.
Bien sûr, les chiens préhistoriques ne sont pas au courant ; trop vieux !
Et pourtant j’avais l’impression qu’ils connaissaient la musique ? Pas vous ?
Donc, non, le plan annoncé n’est pas à la hauteur des enjeux.
De certains peut-être.
En tout cas pas de tous les enjeux. Et pas de ceux du moment.
Au fond, d’ailleurs, ce qui est le plus horriPILant, n’est pas ce qu’il y a dans le PIL, c’est plutôt ce qu’il n’y a pas.
Par exemple :
- rien sur l’accession à la propriété : vouloir relancer sans s’intéresser à l’accession ? Et qu’on ne vienne pas nous parler de la réforme insuffisante du PTZ+ en début d’année.
- rien non plus sur une définition nationale de l’accession sociale à la propriété ni sur un dispositif original ouvert à tous (PSLA et zone ANRU sont largement insuffisants et le PSLA inaccessible au privé dans la pratique du fait de garanties de rachat et de relogement délirantes à certains égards)
- on reste toujours dans une logique bipolaire des acteurs du logement social d’un côté et du logement privé de l’autre. Approche sclérosante, surannée, inefficace et faisant la part belle au clanisme
- rien de puissant à court terme
Pas de quoi le clouer au PILori, car un certain nombre d’actions vont dans le bon sens, mais l’impression d’ensemble est celle d’un patchwork (si on est gentil) ou d’un ensemble de rustines (si on est chien). Un ensemble disparate de mesures de fond et d’effets d’annonces qui semble plus taillé pour la communication que pour partir en guerre comme aujourd’hui.
Et où la question qui surnage est de savoir si ce PIL bricolé est le reflet d’un manque de vision et de créativité, d’un manque de moyens ou le fruit d’une certaine impréparation ? Ou un mix de tout ça ?
Le PIL, c’est votre tasse de thé ? (sinon, il y a la PILsen) Ou on attend l’étape suivante pour avoir du sérieux ?
Merci pour cette analyse pertinente. Pour ma part, je pense que la première intervention devrait viser à unifier la législation immobilière pour que celle-ci soit accessible pour les simples particuliers. L’attentisme dont est victime le secteur peut aussi résulter du fait que le secteur n’est sûr que pour les professionnels.