L’immobilisme, voie d’avenir pour l’immobilier ?

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L’immobilier, c’est du solide. C’est sûr.

Regardez les pyramides, depuis le temps qu’elles nous narguent !

Et pourtant, elles n’ont pas été financées par l’état français et sa fabuleuse politique du logement ; vous savez bien, celle que toute la galaxie nous envie, il paraît ?

Avec ses immenses qualités de pertinence, de rationalité, d’efficacité, de fluidité, de réactivité, de transversalité.

Sans omettre sa capacité à transcender tous les clivages et à pourfendre tous les prés carrés et avantages acquis.

Le bonheur absolu, et le tout au service d’une créativité échevelée, voire ébouriffante.

Alors, c’est sûr, avec de telles caractéristiques, le mieux pour l’immobilier, c’est l’immobilisme !

Ou pas ? 🙂

 

Sacrées pyramides, 42 siècles maintenant qu’elles nous contemplent…

Mais bon sang, autant de m² dans ces logements pour quelques vieux et vieilles impotents chargés de bandelettes…

Quelle sous-occupation !
Qu’est ce qu’on attend pour les muter dans un type 2 ???

Ca, ce serait moderne ! 🙂

Je vais bien, tout va bien..

J’ai parfois l’impression que la politique du logement est un ectoplasme autonome, vaguement dépressif et voulant à toute force donner le change à la mode Dany Boon.

En gros, tout est prévu pour que ça marche :

  1. une fiscalité très lourde, pour laquelle Bercy souhaiterait que les acteurs culpabilisent davantage encore (elle rapporte plus qu’elle ne coûte mais on ne nous parle que du prix de revient…)
  2. une vision technocratique loin de la réalité du vivant : l’immeuble mieux que l’humain
  3. un éclatement des acteurs avec des monopoles de droit et de fait (social / privé)
  4. une sur-administration inutile et sclérosante
  5. une ligne de partage arbitraire et délirante des frontières du social
  6. des objectifs ineptes et intenables
  7. des outils inadaptés et à la limite (voire carrément en plein dedans) de l’illégalité
  8. des réflexes conditionnés d’acteurs englués dans les conventions et les habitudes, incapables d’imaginer un autre avenir que celui des textes poussiéreux parmi lesquels ils slaloment
  9. une politique nationale du logement jacobine et centralisée se heurtant de plein fouet avec les réalités de la décentralisation de l’urbanisme opérationnel
  10. un désintérêt, voire une improvisation consternante pour ce secteur d’activité pourtant essentiel à la vie de la société
  11. et la liste est non limitative

Quelques illustrations de cette liste à la Prévert :

Sur le désintérêt :
Pas de débat sur le logement.
Pas de ministre du logement
, et on ne savait même pas qui le prenait en charge lors de la composition initiale du gouvernement.
Puis éjection de Richard Ferrand et arrivée de Jacques Mézard, alias Jack CRoauer, poids lourd de l’écran mais pas de la politique… 🙁

Sur la fiscalité :
Le logement rapporte environ 20 milliards de plus qu’il ne coûte au budget de l’état (avant le coup de massue sur les APL qui va ramener 1 à 2 milliards de plus)

Sur la vision technocratique :
L’humain dans le logement n’intéresse pas le législateur.
On parle prioritairement de logement social (et pas de l’occupant qui est pourtant la porte d’entrée, c’est bien lui qu’on doit loger pour répondre à son besoin !).
On crée des dispositifs louables comme le PSLA mais en le complexifiant et en obligeant à un achat en 2 temps qui pose problème pour le financement de l’achat sans aider à la constitution de l’épargne qui était en théorie le point de départ.
On invente une usine à gaz comme le BRS qui a plus vocation à créer des parcs locatifs durables de faux accédants qu’à permettre l’ascension sociale et la transmission d’un patrimoine par des accédants à leur progéniture…

Sur l’éclatement des acteurs :
Comme on a dit que c’était le logement qui était social, on crée des producteurs / gestionnaires de logement social (les organismes HLM) et on leur confie un monopole, sans accès direct possible pour le secteur privé.

Sur la sur-administration :
Un échelon administratif national qui invente et gère la complexité pour mieux asseoir sa propre pérennité : réglementation thermique / environnementale, règles de construction, politique du logement, programmation annuelle de cette politique…

Un échelon (ou plusieurs) décentralisés au niveau des départements ou métropoles régionales qui ventilent localement les enveloppes du logement social et la programmation annuelle locale pour freiner un peu plus l’arrivée des crédits…

Sur la ligne de partage arbitraire et délirante du logement social :
Plus de 70 % des ménages sont éligibles au logement social.
Est-ce bien sérieux ?
Et c’est ce chiffre délirant qui sert ensuite à justifier les cohortes de demandes non satisfaites en instance dont on nous rebat les oreilles régulièrement.

Sur les objectifs ineptes et intenables :
L’article 55 loi SRU et la loi ALUR qui fixent à 25 % la quotité de logement social à atteindre en 2025 alors que tout le monde sait que c’est mathématiquement impossible, ce qui n’a pas empêché – cyniquement et politiquement – de laisser faire l’ineffable wonderwoman Cécilou à l’époque.
Et qui oblige maintenant à trouver de faux arguments pour gonfler artificiellement le nombre de logements sociaux.
Alors que, parallèlement, on refuse de prendre en compte les bénéficiaires d’accession sociale, qui ont pourtant humainement et socialement les mêmes caractéristiques que les bénéficiaires du locatif.
C’est beau comme un conte en réalité virtuelle made in shadoks…

Sur les outils inadaptés à la limite de l’illégalité :
L’introduction dans les permis de construire, dont principalement ceux du privé, des servitudes de mixité sociale qui les transforment en permis de construire sous conditions suspensives !
Car on fait comment (avec une sanction pénale à la clé) quand aucun opérateur social ne veut vous acheter vos logements sociaux ou à un prix ridiculement bas confinant à l’escroquerie officielle (économie de subventions d’équilibre pour les collectivités, implicitement ou explicitement complices….) ?
On met le permis dans la naphtaline ?
Et comment aussi, lorsqu’un chantage à la non production / achat de VEFA HLM se fait jour selon les circonstances (cf bras de fer actuel sur les APL par exemple) ?

Sur l’articulation des politiques nationales et locales :
Quand Paris dit (avec raison) qu’il faut construire plus et mieux en économisant la ressource foncière et que, localement, des commissions illégales pré-instruisent à la baisse les permis (chartes abusives et recours au sursis à statuer à l’appui), avec une évolution globale des PLU vers la dé-densification sans réaction des préfets (qui pourraient pourtant intervenir), où sont cohérence et efficacité ?

Sur les réflexes conditionnés des acteurs :
Une administration régalienne, un secteur du logement social monopolistique et campé sur ses avantages qu’il défend bec et ongles, un monde du privé parfois résigné sous l’effet de l’évolution du paysage au cours de la dernière décennie, le nez dans le guidon du court-terme ou sans imagination.

Bref, n’en jetez plus, la cour est pleine ! 🙂

Et il y a vraiment du boulot pour tout remettre en mouvement.

En état de marche…

Et sans tabous ? 😉

On continue comme ça, ou presque ?

Il semblerait qu’un projet de loi logement voie le jour dans le courant du 1er trimestre 2018.

Et que des propositions soient attendues dès le mois prochain.

Mais dans quelle logique, avec quel souffle, et quelle remise en cause de l’existant ?

Ce qui est amusant dans ces questions c’est l’autocensure des premiers intéressés.

Il m’arrive régulièrement de discuter avec mes confrères promoteurs de ces sujets.
Sur le constat et le diagnostic, tout le monde est d’accord.
(y compris la plupart des connaisseurs du système logement, de quelque côté de la barrière qu’ils se trouvent, mais en off seulement…)

Mais quand vient le moment de brosser un nouveau panorama, futur paradigme de l’immobilier neuf, là c’est beaucoup moins évident. 🙂

Entre ceux qui n’imaginent pas, ceux qui ont peur et ceux qui raisonnent uniquement en fonction des règles actuelles qu’ils ont appris à appréhender, l’enthousiasme pour un nouveau monde n’est pas unanime et spontané !

Même avec des interlocuteurs intelligents.
Mais trop formatés.

Les réactions déjà entendues ? Il y en a quelques unes, comme :

  • « C’est trop compliqué »
  • « Ca ne marchera jamais »
  • « Les sociaux ne se laisseront pas faire »
  • « Ce n’est pas notre métier »
  • « Et le traitement social des locataires ? »
  • « Tu as pensé au DALO ? »
    (chassez le naturel et il revient au grand DALO 🙂 )
  • « Comment on va financer et gérer ce bazar ? »
  • « Les maires ne voudront jamais lâcher les permis »

Arghhh…. 🙁

Pourtant, qu’est-ce qui empêcherait :

  • De confier l’instruction des permis de construire aux services locaux de l’état (retour vers le passé salutaire) avec un pôle spécialisé (sous égide préfecture), ce qui permettrait enfin de revenir au droit républicain de l’urbanisme et pas au passe-droit seigneurial de considérations électoralistes aussi locales que féodales.
    A cet égard, il faut aller au-delà de l’évocation de permis de construire instruits à l’échelle de métropoles, car même quand il n’est pas du même bord, le « personnel politique local » se comprend très bien et les échanges de petits services sont un risque plus qu’évident.
    D’autant que – finalement – il serait si confortable pour un Maire de dire, « ce n’est pas moi, c’est le Préfet » pour se dédouaner de ce pan de responsabilités ; et que cette perspective pourrait ne pas déplaire à tout le monde…
  • De fixer un seuil d’accès (plafonds de ressources des ménages) à une forme d’aide sociale au logement inférieure aux plafonds actuels (30, 40, 50 % de la population ? mais pas 70…)
  • De laisser le libre choix du logement (conventionné ou pas) à ces ménages ?
  • De donner accès, pour le secteur privé, au même circuit de financement (ou à un autre circuit donnant les mêmes droits et avantages) que le secteur social pour la production de logements spécifiques ; ce qui résoudrait illico tous les risques de permis bloqués et de non production de logements
  • que ces mêmes opérateurs privés puissent confier en gestion à des opérateurs sociaux actuels (ou à d’autres structures patrimoniales sectorielles ou privées, foncières etc…) ces logements, dans le respect des règles d’attribution futures
  • de revoir les objectifs quantitatifs et qualitatifs de réalisation, soit en les adaptant (prise en compte des accédants sociaux par exemple), soit en les supprimant.
  • de ne plus avoir de programmation annuelle du logement, mais la fixation d’objectifs généraux, à guichets ouverts et sans limitation quantitative par nature de logement (on veut construire plus ou pas ? On parle de choc d’offre ou pas ?) avec des critères pertinents et connus à l’avance, avec principe de confiance et contrôle a posteriori comme dans tellement d’autres situations.
    On éviterait enfin de bloquer des projets immobiliers pendant des mois, et parfois plus d’un an, alors qu’on prétend être en manque de logements.

Sur le fond, et mêmes si la chasse aux APL est actuellement ouverte, il y aurait néanmoins une voie alternative pour aborder de ce côté là (avec moins d’efforts sur l’aide à la pierre, réservée par captation de principe aux propriétaires de logements sociaux) avec une banalisation des logements (sociaux ou privés), conventionnés ou pas, sous condition de respect de loyers calibrés.
Ce qui revient à dire que – potentiellement – tout logement (ou presque) serait ouvert à tout public (dont public « social »), l’APL variable venant transformer un logement banalisé en logement à occupation sociale.

L’accompagnement social nécessaire à une partie des attributaires d’aide (ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on a forcément besoin d’une assistante sociale ou qu’on pose problème dans sa cage d’escalier : étudiants, petits retraités, jeunes ménages en début de parcours…) pourrait provenir d’une structure indépendante (et pas forcément des services du bailleur social propriétaire du logement) afin de constituer une réponse universelle et adaptée à l’essaimage du logement aidé.

Ce qui permettrait aussi de mettre fin aux ghettos (que l’on critique, mais sans rien changer au principe de spécialisation des acteurs et de constitution du « parc locatif »), avec une répartition spatiale beaucoup plus diversifiée (alors qu’actuellement les parcs immobiliers sont concentrés et parfois partiellement inutiles, avec une aide à la pierre mal optimisée, sans compter les sous-occupations de logements et les surloyers peu ou faiblement appliqués).

Une autre logique d’APL donc, pas uniquement dépense budgétaire annuelle mais préfiguratrice d’un nouveau modèle d’accès au logement aidé.

ALTEA : Allocation Logement à Taux d’Effort Adapté.
Ca le fait, ou pas ? 🙂

Alors là, c’est pas gagné… Va falloir noircir des feuilles pour convaincre….

Ou les verdir ? 😉

Y en a sûrement encore beaucoup CRO qui vont dire que ça dépasse l’entendement !

 

Chlorophylle préhisto
Ouais, c’est sûr qu’être dur de la feuille, ça n’aide pas !

 

Hé ho, attention, on n’est pas en train de fabriquer la politique du logement entre nous là ! 😉

Juste – avec ce petit feuillet 😉 – en train de suggérer à demi-mot (ou à  2000 mots ? 🙂 ) qu’il existe d’autres pistes que les vieux machins éculés qu’on nous oblige à utiliser depuis si longtemps en dépit du bon sens.

Et que si on veut vraiment faire bouger les lignes, il y aurait moyen de mettre des gens de bonne volonté et créatifs autour d’une table.

Afin d’inventer d’autres possibles.

Pour que – enfin – immobilier rompe avec immobilisme !

 

Allez, et si vous me disiez quelle politique vous feriez, vous ?
Sans trop vous effeuiller…. 😉

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